La question centrale de cet ouvrage se situe à la croisée du réalisme et de l'idéalisme : comment peut-on à la fois affirmer que les objets dont traite la mathématique possèdent un être identique en tout temps et pour tout sujet pensant et qu'ils ont été produits par un sujet mathématicien ? L'idéalité des objectités formelles implique en effet leur autonomie ontologique vis-à-vis de la conscience, donc l'impossibilité de les produire. Or ces objets idéaux requièrent l'invention d'un système de notations symboliques et font leur apparition à un moment de l'histoire : n'est-ce pas le signe de leur dépendance ontologique vis-à-vis de la spontanéité productrice de la conscience ? Partant, la vérité mathématique doit-elle être conçue comme adéquation de la connaissance à des objets qui lui préexistent, ou comme dévoilement d'objets n'ayant ni existence en soi, ni préexistence à l'acte qui les dévoile ?
Ces questions fournissent l'occasion d'élaborer un discours de la méthode phénoménologique, d'analyser le mode d'être temporel des idéalités et de conjoindre idéalisme du sens et réalisme nomologique : si le sens mathématique est engendré, propriétés et lois doivent être découvertes et démontrées.