Traiter en quelques pages un sujet aussi vaste et controversé que « la franc-maçonnerie en France à la veille de la Révolution » est une gageure qu’on ne peut espérer tenir qu’en se limitant à l’essentiel. Néanmoins, pour que cet exposé nécessairement très général ne ressemble pas trop à un de ces squelettes décharnés que l’on voit dans les « cabinets de réflexion » des loges maçonniques, je m’efforcerai de le nourrir d’exemples concrets pris dans la région toulousaine, et plus particulièrement dans le Gers. Ce qui frappe d’abord lorsqu’on tente de prendre la mesure du phénomène maçonnique dans la France du XVIIIe siècle, c’est la rapidité et l’ampleur de sa diffusion. Née en Angleterre en 1717, la franc-maçonnerie moderne, dite « spéculative » pour la différencier de la maçonnerie « opérative » des bâtisseurs médiévaux, s’est implantée à Paris en 1725. Elle gagna ensuite les capitales provinciales, Bordeaux dès 1732, Toulouse en 1741, Montauban en 1745 et Auch en 1746, pour ne citer que les chefs-lieux des généralités du Sud-Ouest.