De la bêtise à la bêtise, il y a un saut dans le vide. Celui-là même que chacun devrait envisager lorsqu'il pressent combien fragiles sont ses certitudes, fuyantes ses pensées, approximatives ses connaissances. «Oubliez tout, lisez ceci» : injonction paradoxale, de celles dont ce petit essai regorge. Sans pédantisme ni forfanterie, avec la confiance tranquille de ceux qui ne vont nulle part tout en faisant du prosélytisme une marche à reculons, cette Adoration de la bêtise est un viatique précieux, un recueil d'aphorismes pour tous ceux qui ne savent pas se faire plus bêtes qu'ils ne sont, mais qui aimeraient l'être pour de bon.
Avec bon goût et mauvaise foi, avec sérieux et sens du jeu, quelque part entre Flaubert, Cioran et Vialatte, la plume méchante et délicate de Smolders gratte la fine pellicule du savoir sur le crâne de l'homme civilisé - et il neige une malicieuse intelligence, en pure perte. Comme un gosse, ravi, on recueille alors les miettes acidulées de cette langue à la fois sévère et jubilatoire.