Fin de voyage
« J'ai pris le large pendant quelques jours avant de me remettre à mes travaux de recherche. Seul dans ma maison silencieuse, je noircis moi aussi les pages d'un grand cahier. J'évite de regarder dans la direction de Bénodet ; il est quatre heures, l'heure fatidique, et je ne sais que trop comment s'éteignent les réverbères de la corniche, un jaune puis un blanc, et ainsi de suite jusqu'à ce que tout plonge dans le noir. Je sais aussi qu'à mi-chemin entre l'anse du Trez et la pointe Saint-Gilles il n'y a plus aucune lumière : c'est la nuit, nous le savons tous, qui finit toujours par l'emporter. »
Qu'il surgisse en Utah ou aux confins du Finistère, le fantastique de Fin de voyage, tantôt macabre et tantôt familier, détourne la réalité de ses chemins habituels pour lui faire emprunter des voies d'entre deux mondes. Revêtant tour à tour le masque de l'animal et celui de l'humain, les traits d'un enfant asocial ou ceux d'une vieille acariâtre, ses personnages fantômatiques sont souvent des exilés, des êtres en perdition qui atteignent le bout de leur voyage dans le réel. Avec son premier recueil de nouvelles Jacques Péron signe une oeuvre riche de poésie, d'humour et de mystère.