Le livre commence par une grande blessure et se termine par une plaie plus douloureuse encore : l’avancée inexorable de la vieillesse d’une mère, et la mort d’une fille minée par un mal insidieux. Quant aux pages intermédiaires, elles représentent une véritable tentative de sauvetage, une manière d’échapper aux mâchoires de l’implacable étau où la nature humaine se trouve piégée. Gaspard, le narrateur, y évoque les moments essentiels de la vie de femmes de cinq générations successives et essaie, par personnages interposés, d’observer les changements que provoque dans l’esprit du temps l’inexorable cheminement des années.
Il confie d’ailleurs, dans un passage du livre — « j’ai moi-même été formé et préparé à la vie par des femmes. [...] Plus proches du quotidien et confiantes en l’avenir, elles inculquent les lois de l’existence avec davantage de simplicité et de réalisme. ». — Nombreux seront sans nul doute ceux et celles qui, persuadés comme Gaspard que les femmes sont les gardiennes des valeurs et des bienfaits de l’existence, leur reconnaîtront sans hésiter le mérite de créer la chaleur, l’intimité et la lumière grâce auxquelles la vie devient pour leur entourage un bonheur de tous les jours.
Les chats, dit-on, ont neuf vies ; j’en suis, moi, à ma neuvième biographie qui s’enchaîne en neuf étapes :
Une naissance, un 6 mars, à la veille de l’Évacuation,
Une enfance dorlotée d’amour et de sollicitude,
Une jeunesse douce et studieuse,
Une vie amoureuse exaltante et comblée,
Une vie familiale baignée de chaleur et de lumière,
Une vie professionnelle consciencieuse et intense,
Une vie sociale foisonnant d’amis et de rencontres irremplaçables,
Une carrière de Germaniste apprécié de ses élèves,
Une retraite pleine de projets et d’imprévus...
Finalement les neuf vies d’un chat... chanceux, quoi !