Pendant plus de vingt siècles, les jurisconsultes ont
débattu du droit. Traitant des lois naturelles, ils faisaient référence
aux principes moraux du monde civilisé et à la nécessité pour les
États de s'accorder sur des règles qui leur permettraient de coexister
dans la paix. Après qu'Athènes eut ébauché les premières
règles d'un droit international privé, Rome rédigea un jus gentium,
ensemble des droits accordés aux peuples étrangers, un droit que
Justinien codifia pour le monde chrétien.
Au XVIe siècle, le théologien catholique espagnol Vitoria
pose la première pierre de l'édifice d'un droit des gens, expression
de la renaissance de l'humanisme. Au XVIIe siècle, Grotius fixe les
règles de ce droit dans la guerre et dans la paix, alors qu'au terme
de la guerre de Trente Ans, la paix de Westphalie tente d'établir un
équilibre européen. Les jurisconsultes du XVIIIe siècle incluent le droit
des gens dans le droit naturel, puis Vattel, dans un ouvrage écrit en
langue française - et non plus en latin - dissocie ces deux droits,
au nom de la raison. Les Lumières, les Révolutions américaine puis
française, l'Empire napoléonien imposent les principes des droits
de l'homme : on commence à parler d'un droit international.
Au XIXe siècle, conscients de la nécessité de contenir les
violences de guerre, les jurisconsultes posent les fondements d'un
droit pénal international. Au terme de congrès et de conférences,
ils les font adopter par de plus en plus de nations. Néanmoins, à
la veille de la Première Guerre mondiale qui ouvre un siècle de violences
extrêmes, ce droit n'est qu'une ébauche.
Comme le développe Yves Ternon dans cet ouvrage, le
droit international est l'oeuvre de ces Pères fondateurs. Pour chacun
d'eux, son élaboration se situe dans un espace politique et un
mouvement de pensées qui influencent leur oeuvre. Ce droit, ils l'ont
construit avec les philosophes, les publicistes et autres témoins de
leur temps, tout en demeurant attachés aux intérêts de leur nation.