Les textes sont formels : à compter de 1922, Alberto Giacometti
«fréquenta» l'atelier d'Antoine Bourdelle «plusieurs années durant».
Mais quelles furent les modalités et la durée exacte de cette fréquentation
? Personne ne le sait, le Suisse ayant laissé flotter le doute sur
ces mois d'apprentissage sans que personne n'osât les approcher
réellement, loin de toute mythologie et de toute mystification.
Giacometti pouvait-il reconnaître l'héritage d'Antoine Bourdelle,
au risque d'être plombé par un passé trop lourd ? Du reste, obsédées
par la tabula rasa et l'ex nihilo, les avant-gardes savent-elles accueillir
leurs maîtres ? Partant, cet ouvrage entend décrypter un désaveu
singulier et explorer l'histoire plus générale de l'enseignement sous
le régime de la modernité, à l'heure où «les disciples renforcent, disséminent
ou trahissent les sinus personnels et sociaux de l'identité»
(George Steiner).