«J'étais pourtant un bon candidat au bonheur. J'étais
dégourdi. Toujours aux avant-postes. Au grand bal de
la vie je me suis servi presto. J'ai écouté le rossignol à
la nuit tombée, capté l'odeur du vent, fouillé les braises
du passé. Je voulais tout ce que je ne voyais pas venir, le
poulet, le caviar, l'instruction, la certitude d'être aimé.
Au lieu de cela j'ai récolté la violence et l'humiliation.
N'importe ! Hardi sur la cabosse, je n'étais pas douillet.
Puisque je voulais tout voir, j'étais prêt à traverser les
cerceaux de feu tendus sur mon passage. Ainsi s'est abattu
le froid sur la vie rêvée de votre serviteur qui s'annonçait
pourtant comme un banquet sans fin.»
Avec sa verve inimitable, Jean Vautrin se glisse dans la
peau d'un jeune Gitan, Cornelius Runkele. Amoureux
des mots, de la vie, fidèle à la kumpania mais désireux de
s'intégrer, Cornelius court après une liberté que la société
refuse de lui donner.
Journal d'un rebuté de la vie, Gispy blues est un roman
vibrant de colère et d'humanité, l'hommage d'un grand
auteur à la culture gitane.