Girart de Vienne
Le texte de Girart de Vienne, généralement daté du début du treizième siècle dans la version offerte par l'édition de Wolfgang van Emden, publiée en 1977, ne manque pas de séductions diverses. La chanson est l'illustration d'un monde en mutation qui voit s'exacerber des oppositions entre de grands feudataires, qui souhaiteraient se libérer d'une tutelle trop oppressante, et une autorité royale qui voudrait s'affirmer. C'est la génération des fils de Garin de Monglane qui est à la tête de la garnison de Vienne. Le caractère ombrageux des Viennois les plus impétueux est sensible dans de soudains et passagers déchaînements de violence qui vont de pair avec un naturel respect de la légitimité royale. La Cour, qui devrait être une sphère de dignité, de sérénité et d'équilibre, n'est le plus souvent que le champ clos d'affrontements violents, dissonants et drôles. Un des traits nouveaux que recèle Girart de Vienne, c'est l'importance de plus en plus grande de la Parole dans la sphère du Pouvoir. Force de substitution, il lui arrive parfois d'être caractérisée par une étincelle de divinité. Le Pouvoir de Dieu se substitue au Pouvoir de l'Homme et la Parole de Dieu impose le silence à la créature. La séduction narrative de Girart de Vienne repose sur une assez large palette de procédés littéraires qui donnent au lecteur le sentiment d'une création plutôt bien maîtrisée.