Witold Gombrowicz, écrivain polonais majeur du XXe siècle, est parfois
considéré comme un marginal tant son originalité est audacieuse. Michal
Glowinski, déjà lecteur de Ferdydurke à une époque où les exemplaires du
roman étaient retirés des bibliothèques de la Pologne stalinienne, resitue
l'oeuvre provocatrice, inclassable, de son compatriote, dans la tradition
littéraire polonaise, européenne et mondiale. En onze essais, il aboutit
ainsi à une constatation surprenante : «Chez Gombrowicz, la tradition
n'est pas un impératif, pas plus qu'elle n'est un modèle à imiter [...]. Elle
est un point de départ [...]. Un matériau qui ne sert pas à répliquer ce
à quoi il a déjà été utilisé, mais qui autorise de nouvelles structures,
inconnues jusque-là, jamais proposées par la tradition parce que
impossibles au cours des époques antérieures. Gombrowicz, en permanence
original, novateur, souvent surprenant, échafaude sa littérature
à partir de la littérature. De ses oeuvres de jeunesse à Cosmos ou
Opérette, son domaine est une surlittérature très particulière.»
Ce livre apporte un éclairage nouveau et complémentaire aux études
gombrowicziennes françaises. Il ne manque pas de signaler combien
chez Gombrowicz aucune tournure, aucun mot utilisé, n'est le fait d'un
hasard innocent, mais toujours allusion, renvoi, référence.
L'auteur de La Pornographie est «présent et pourtant absent» ; nous
croyons le connaître, or nous sommes loin d'avoir exploré toutes ses
richesses. Michal Glowinski nous en dévoile quelques-unes. Ainsi il
démontre que l'une des recensions que Witold Gombrowicz publiait
dans la presse varsovienne est la critique d'un livre inexistant.
Gombrowicz y parle, en effet, de son grand roman alors en gestation,
Ferdydurke. Dans le présent volume, le lecteur trouvera la version
intégrale, inédite en français, de cet article : «Du domaine des rêves
trop faciles. Les péchés de notre siècle transitoire.»