Journaliste talentueux et provocateur imprévisible, Gustave Hervé s'est attiré tout au long de sa vie les admirations les plus fidèles et les haines les plus féroces. Sa plume trempée dans le vitriol, son génie de la propagande - qu'on décrirait aujourd'hui comme l'art d'un " grand communicateur " - en font un des créateurs de la presse moderne.
Gustave Hervé est un des personnages les plus originaux et passionnants de la IIIe République. Né à Brest en 1871 et mort à Paris en 1944, il démarre sa carrière de professeur d'histoire et de propagandiste dans l'Yonne, en 1900, sous le pseudonyme de " Sans Patrie ". Révoqué de l'enseignement, devenu avocat et radié du barreau de Paris pour raisons politiques, il est le leader incontesté des antimilitaristes et des antipatriotes au sein de la SFIO et fonde en 1906 un célèbre hebdomadaire révolutionnaire, La Guerre sociale. Ses articles incendiaires contre l'armée et la police lui valent plusieurs condamnations à de lourdes peines de prison et un sobriquet glorieux : " L'Enfermé ". Pourtant, dès le début de la Grande Guerre, en juillet 1914, ce socialiste insurrectionnel devient un propagandiste acharné de la cause patriotique. Dès lors, il glisse peu à peu vers un socialisme national qui le place aux avant-postes des droites extrêmes dès les années vingt. Admirateur du fascisme italien et du national-socialisme allemand, c'est lui qui lance dès 1935 le slogan " C'est Pétain qu'il nous faut ". Il deviendra un des plus fervents soutiens du maréchal, avec lequel, pourtant, jamais à court de volte-faces paradoxales, il prendra ses distances dès 1940. Journaliste talentueux et provocateur imprévisible, il s'est attiré tout au long de sa vie les admirations les plus fidèles et les haines les plus féroces. Sa plume trempée dans le vitriol, son génie de la propagande - qu'on décrirait aujourd'hui comme l'art d'un " grand communicateur " - en font un des créateurs de la presse moderne. Quant à sa trajectoire singulière, elle est l'incarnation exemplaire de la complexité politique de la première moitié de notre siècle.