Le 4 octobre 1938, à l'Assemblée nationale, un député de droite, seul, vote contre les accords de Munich qui livrent la Tchécoslovaquie à Hitler. Il s'appelle Henri de Kerillis. Fils d'un amiral breton, il s'illustre comme lieutenant de cavalerie, pendant la première guerre mondiale, puis se reconvertit dans l'aviation et se couvre de gloire à la tête de son escadrille de bombardiers. Toute sa vie il restera un combattant. Après la guerre, il quitte l'armée pour le journalisme, et entre à l'Écho de Paris où, très vite, il prend la direction du service politique. Parallèlement, il mène une activité intense : fondation du centre de propagande des Républicains nationaux, création d'un cours d'orateurs, participation aux premières émissions à la radio, etc. Mais le grand mérite d'Henri de Kerillis est d'avoir fait du combat contre l'hitlérisme la priorité absolue. Dans ses articles de l'Écho de Paris, puis de l'Époque (qu'il fonde en 1937), il ne cesse d'en appeler déjà à la résistance, annonçant la guerre qui vient et prônant la modernisation de l'armée. À l'arrivée des Allemands à Paris, il s'envole pour Londres, puis rejoint New York où il crée un journal gaulliste, Pour la victoire, avec Geneviève Tabouis. À partir de 1942, les malentendus s'accumulent avec le chef de la France libre, dont il devient un farouche opposant. Dès lors Kerillis, qui a acheté une ferme, vit en exilé sur ses terres de Long Island. Lui qui fut, dans les années 30, l'« un des rois de Paris », élève des vaches et cultive des pommes de terre, tout en continuant à entretenir, jusqu'à sa mort en avril 1958, une correspondance passionnée avec ses amis de France. Une France dont il était, envers et contre tout, « fou amoureux » selon le mot de Maurice Schumann.