Depuis 1962, le peuple français élit le président de la République au suffrage universel
direct, mais le régime de la Ve République n'est pas présidentiel pour
autant parce que les pouvoirs législatif et exécutif ne sont pas séparés. Ils sont,
au contraire, unis l'un à l'autre par l'intermédiaire des ministres qui ont un pied
dans le législatif et un autre dans l'exécutif. Dans un vrai régime présidentiel
comme aux États-Unis, les pouvoirs législatif et exécutif sont nettement séparés.
Les hommes qui entourent le président n'ont aucun lien avec le Congrès et le
Congrès est seul maître des lois. Le président ne gouverne que par sa capacité à
convaincre, c'est-à-dire son leadership.
Le président des États-Unis n'est pas puissant parce qu'il dispose d'une majorité
au Congrès, mais parce qu'il agit au nom de toute la Nation. Les présidents américains
sont tous des rassembleurs ; ce sont des leaders plus que des chefs ; ils
exercent moins «le» pouvoir que «des» pouvoirs ; aucun d'entre eux n'a jamais
pu durablement s'imposer par la seule force d'une majorité toute puissante parce
qu'ils conduisent les États-Unis au sein d'un système de gouvernement qui fut
conçu à partir des enseignements de Montesquieu et dans lequel «le pouvoir
arrête le pouvoir».
Aucun système politique n'est parfait ; mais du choix initial fait par les constituants
à Philadelphie de séparer les pouvoirs est née une forme de gouvernement
qui, tout en étant doté de la fermeté et de l'énergie nécessaire à l'Exécutif, reste
toujours républicaine sans jamais être monarchique. À l'heure où le régime de la
Ve République s'étouffe dans une hyper-présidence qui suscite bien des doutes
sur l'efficacité des réformes adoptées pour moderniser et rééquilibrer les institutions,
le gouvernement présidentiel aux États-Unis est une expérience qui donne
matière à penser.