Le Centre d'Etude de l'europe médiane (Institut national des Langues et Civilisations orientales), dont l'activité pluridisciplinaire couvre cette Europe longtemps qualifiée d"Autre" et soumise à la tutelle ou à la surveillance soviétique pendant plus de quarante ans, s'est interrogé sur la "transition" consécutive à l'automne 1989 en partant d'un constat simple : face à un discours de rupture radical, parfois même révolutionnaire, des phénomènes de continuité persistaient. Gênés par ces décalages patents entre discours et réalités, nous avons formulé l'hypothèse que l'historiographie, comme miroir des spécificités, des continuités et des discontinuités nationales, était un lieu privilégié de compréhension des événements et devait refléter les caractéristiques des sorties du communisme.
Comment se sont développées les études historiques sous les régimes finissants des années 1980 ? Quels rapports étaient alors tissés avec le pouvoir ? Quels étaient les espaces de liberté laissés aux historiens ? En quoi leurs travaux ont-ils reflété l'état de leurs sociétés ? Et, surtout, comment les communautés d'historiens ont-elles vécu le bouleversement de 1989-1990 ? C'est un bilan collectif qui est ici dressé pour la Pologne, les Pays tchèques, la Slovaquie, la Hongrie, la Roumanie, la Bulgarie et les pays de l'ex-Yougoslavie. Il dépasse très largement la simple description savante et rappelle la nature kaléidoscopique de l'Europe médiane.