C'est pétri d'illusions que le jeune ingénieur Hugo
Pectoralis débarque de son Allemagne natale dans un petit
village reculé de la campagne russe, chargé de moderniser
une grosse exploitation agricole en introduisant des
méthodes novatrices de travail. Rempli d'une volonté de
fer, il apprend le russe en six mois, grimpe dans la
hiérarchie, déterminé à imposer sa vision du monde qui,
pense-t-il, améliorera le sort des paysans et générera des
profits à l'entreprise. Mais, projeté dans l'univers inconnu
de la Russie profonde et de ses habitants, prisonnier de sa
vanité et de son entêtement, Pectoralis connaît très vite
des démêlés avec Safronytch, un brave paysan veule et
ivrogne qui, sans le vouloir, le conduit à sa perte. Car les
moujiks l'observent, incrédules, le narguent, jusqu'à ce
qu'il devienne la risée du village tout entier.
Comme dans Oblomov, le grand roman d'Ivan Gontcharov,
Leskov oppose la Russie éternelle à l'Occident, personnifié
par Hugo Pectoralis. Avec son lot d'images et sa morale
finale, ce petit roman échappe à son temps et s'offre à la
lecture avec une bonne humeur jubilatoire.