Dernier volet de la trilogie d'Andrea Zanzotto, Idiome entend rendre compte du mouvement destructeur et généalogique du langage à travers le chas, ou prisme, du bourg natal du poète suffisamment anonyme pour représenter tout lieu. C'est aussi le moment social de son oeuvre riche en silhouettes, profils excentriques et autres décalcomanies subtiles, souvent dévolues au dialecte. Le poète restitue d'un côté l'immanquable mouvement d'usure des langues et langages d'erreurs grammaticales en usages privés, de déformations en corruptions diverses, de l'autre, de leur impétueuse germination entre idiomatismes, idioties et leur niveau moyen, l'idiome unanimement accepté. Cette conscience de la dynamique du langage, des «métabolismes erratiques du tout», appelle son apaisante suture. Pour ce faire, comme le François Villon de la Ballade des dames du temps jadis, le poète revisite les ubi sunt pour nous donner sa section centrale: Aller coudre où la biographie d'un moi se révèle inextricablement distillée par la «biographie» d'une petite communauté. Andrea Zanzotto met en évidence la Zauberkraft, la force magique - celle du symbolique - évoquée par le philosophe Hegel. On assiste alors à la transformation du temps de la poésie en espace poétique nouveau, omnicompréhensif. Une réversibilité du faux (les poncifs) en vrai (l'intensité de l'expression) peut finalement opérer. Le poète vise une poésie totale, il inclut alors dans ses poèmes des dessins, sigles, et autres icônes pour nous donner un recueil récapitulatif.