À travers les 85 photographies d'un album conservé aux Archives fédérales de Coblence,
Sarah Gensburger revient sur l'histoire de la spoliation des Juifs à Paris pendant la Seconde Guerre
mondiale. Pris par les Allemands entre 1940 et 1944, ces clichés ont été rassemblés en album
en 1948 par les services alliés en charge de la restitution des biens volés aux Juifs.
Si plusieurs images donnent à voir le séquestre du Louvre et le pillage des collections artistiques,
la plupart concernent le travail de tri effectué par des détenus juifs du camp de Drancy.
Trois camps annexes ont en effet existé à Paris entre 1943 et 1944, dans lesquels près de 800 internés
ont travaillé quotidiennement au conditionnement du contenu de 38 000 appartements parisiens.
La diversité des sites (musée du Louvre, Palais de Tokyo, Gare du Nord, Lévitan, magasins généraux
d'Aubervilliers et Bassano) souligne l'emprise de la spoliation sur la capitale. Matelas, postes de TSF,
batteries de cuisine, jouets d'enfants, linge de maison... : ces clichés montrent également avec force
la pauvreté et la banalité des possessions de l'écrasante majorité des familles juives, ainsi
que la normalisation et la nature absolue du pillage.
Reflet de l'entreprise de destruction totale, par le pillage de leurs biens, de toute trace de l'existence
des Juifs, ces images constituent, simultanément, une des traces de cette existence même.
Elles donnent également la parole à ceux qui en sont les personnages, presque invisibles :
les internés des camps annexes de Drancy. Ceux-ci ont en effet peu témoigné de leur expérience.
Ce livre-enquête tente de comprendre leur silence.