C'est au Yemen, sur la route menant d'Aden à Al Mukalla que l'insolation a frappé Tigrane. Le présent recueil s'ouvre donc sur la fièvre, le délire, l'angoisse mais aussi l'extase. Du Yemen au Levant, en passant par l'Ibérie, Paris et l'Arménie(s) plurielle, le jeune poète et journaliste de 25 ans investit ces lieux d'un sens poétique intime, au gré de ses « urgences ». Ces poèmes ne suivent pas un ordre chronologique mais spatial, pourtant le poète n'est ni touriste, ni voyageur. Chacun de ces espaces parcourus relèvent d'une absolue nécessité. Tel un fil conducteur, une incantation particulière traverse ce recueil, celle d'un tu parfois écrit Tu, tantôt masculin, tantôt féminin. Le petit autre et le Grand Autre. La femme aimée, l'ami, Dieu. Mais aussi sans doute le frère disparu. Tigrane parle à quelqu'un, l'interroge, l'interpelle. Reflets d'une existence marquée par la fragmentation du réel, ces poèmes ne sont ni lyriques, ni élégiaques, ils sont dramatiques. Il se passe sans cesse quelque chose entre le poète et ce tu mystérieux. C'est ainsi que Tu n'est jamais un procédé stylistique mais la raison même de la convulsion poétique.