Les textes ici réunis ont pour trait commun de s’interroger sur quelques articulations du dialogue et de l’interprétation. Le dialogue, tel qu’on l’envisage, ne se caractérise pas par une grammaire des enchaînements, mais plutôt par des ensembles de mouvements, d’événements discursifs plus ou moins imprévisibles aussi bien pour le destinataire concret que pour le locuteur lui-même, et éventuellement pour les tiers lecteurs. Ces mouvements peuvent se faire dans l’échange même ou, selon la tradition d’analyse ouverte par Bakhtine, prendre sens par rapport aux paroles transmises par la tradition. C’est en cela que le dialogue constitue une interprétation, qui est d’abord une prise en compte de la diversité des régimes de signification tels qu’ils se dessinent dans le déroulement de l’échange. La rencontre avec des dialogues d’enfants met sans doute mieux en évidence ce que ces mouvements peuvent avoir d’irruptif, les dialogues qu’échangent les adultes étant souvent plus prévisibles. En étudiant ces dialogues, on ne cherche pas tant à voir les façons dont la langue des enfants se rapproche ou s’éloigne de celle des adultes qu’à se demander, ce qui n’est pas la même chose, comment les enfants se réapproprient le langage. Enfin, en ce qui concerne les aspects de la psychopathologie, on tente dans le même esprit à isoler non des symptômes, mais ce qui manifeste la réaction d’un sujet à ce qui lui arrive.