La préférence accordée à l'islam soufi, islam supposé pacifique, dans sa variante africaine, c'est-à-dire « noire », n'est que le nouvel avatar du primitivisme à l'âge du djihadisme. Le primitivisme, qui a fait de l'Afrique le continent du fétichisme à l'époque de la traite des esclaves, l'a ensuite caractérisé sous la colonisation comme le havre de l'« islam noir » et actuellement comme celui de l'islam soufi... Islam noir, Islam soufi : islams pacifiques ?
Or, l'Afrique, au cours de son histoire, n'a cessé de résister à ce stéréotype à travers les nombreux djihads intervenus au XIXe siècle ou ceux qui se déroulent actuellement. Tout en soutenant les formes locales de l'islam soufi, en tant que contre-feux à l'islam radical, les pouvoirs africains et les puissances étrangères qui interviennent sur le continent entendent le renforcer en organisant une « déradicalisation » du personnel musulman ouest-africain dans d'autres pays, comme le Maroc, soumis également à la menace salafiste, wahhabite ou djihadiste. L'islam soufi apparaît ainsi, en définitive, comme la variante postcoloniale de l'« islam noir ».