Au milieu des années 60, Octave Mannoni écrit un article dans lequel il précise sa réflexion psychanalytique sur le fonctionnement de la croyance et celui du déni, conceptualisés par Freud mais considérés comme des thèmes marginaux en psychanalyse. Il va décortiquer l’expression si banalement employée « Je sais bien, mais quand même… », la placer au centre des problématiques propres à la Verleugnung (« déni de réalité ») et l’illustrer par des exemples passionnants tirés de l'ethnologie ou de la littérature : le récit d’un rite initiatique chez les Indiens Hopi ou encore celui d’un extrait des Mémoires de Casanova dans lequel le célèbre séducteur est saisi de superstition un soir de gros orage. D'une grande clarté, la prose vive et non dénuée d'humour d'Octave Mannoni avance avec précision dans les sinuosités du concept.
Octave Mannoni (1899-1989) était psychanalyste. Cet esprit libre, passionné de poésie et de botanique, enseigna durant 30 ans, en Martinique et à Madagascar, la philosophie et la littérature jusqu'à sa rencontre avec Lacan, fin 1945, qui l'installe en écriture. Il n’aura de cesse de s’appuyer sur sa connaissance fine de l'ethnologie, de la philosophie et de la littérature pour étoffer sa pratique psychanalytique. Ses principaux écrits sont publiés au Seuil, dont Psychologie de la colonisation, Clefs pour l’Imaginaire ou l’Autre Scène et Ça n’empêche pas d’exister.
Préface de Sophie Mendelsohn, psychanalyste, qui est à l’initiative de la constitution du Collectif de Pantin, réunissant psychanalystes, philosophes et anthropologues autour de l'incidence de la race en psychanalyse. Elle a récemment coécrit avec Livio Boni La Vie psychique du racisme (La Découverte, 2021).