La touche est davantage qu'une inflexion particulière donnée par le peintre à son geste, elle contient l'attente, l'errance, la saveur et la couleur de toute chose rencontrée, nommée ou tue, lorsque la main se précipite vers la toile et s'y enfonce.
Et virant, joue plaquée contre la vitre d'un bus, l'oeil surveillant en coin le mouvement des façades, son regard se courbant avec elles, Liron peint.
Arrêter le terme de monographie, pour qualifier l'approche lente, multiple et scrupuleuse qu'Armand Dupuy consacre dans ce livre à la peinture de Jérémy Liron, ce serait taire combien la perception - celle des toiles, celle du monde - y est élevée au rang de geste ; et combien, par ce geste, l'auteur embrasse les questionnements du peintre, faisant avec lui cause commune.
C'est ici par les voies de l'introspection et du souvenir, chaque fois en parallèle ou à la suite d'une patiente excavation du matériau mémoriel et sensible, que se dégage une possible lecture des tableaux. Travail d'écrivain autant que travail de critique, si attentif à son objet qu'il formule des hypothèses qui le traversent et le dépassent, offrant ainsi une mise au point essentielle sur une oeuvre encore en devenir.