Depuis le XVIe siècle, Jheronimus Bosch (Bois-le-Duc, 1450/1455-1516) suscite une abondante littérature qui, focalisée sur la signification de ses inventions fascinantes, en a fait progressivement un peintre isolé de tout contexte, en laissant largement de côté la question primordiale de la chronologie. Sa production, confondue avec celle de l'atelier et des suiveurs, nécessite donc une étude qui, aiguillée par l'analyse stylistique, fasse converger l'ensemble des données disponibles (documents, résultats dendrochronologiques, etc.). Elle s'organise autour de l'unique œuvre documentée, le Jugement dernier de Vienne, peint vers 1505 pour Philippe le Beau, et comprend deux groupes articulés selon un développement cohérent. Le premier (avant 1505) se caractérise par une manière fluide, liée à l'intérêt humaniste pour la celeritas. Le second (après 1505) manifeste une manière plus patiente qui, adaptée au goût de la clientèle bruxelloise, culmine dans le célèbre Jardin des délices. Se dessine ainsi le profil d'un peintre très apprécié par l'élite politique de son temps et dont les inventions, diffusées sur le marché anversois par des copies et des pastiches, joueront un rôle décisif dans l'émergence de la notion même de genre.