Je n'ai jamais interrompu mon Journal, j'y ai
consacré machinalement beaucoup plus de
temps encore, j'allais m'asseoir dans les cafés et
je tenais mon petit registre et pour ne pas me noyer
définitivement, j'ai tenté aussi de mettre au propre
les cahiers précédents. Chaque jour, j'ai recopié
calmement les années précédentes. Peut-être les
choses reviendront-elles sans trop de violence, on
se dit cela, je ne sais pas. On peut écrire sans écrire,
tricher, mais aussi rester là en silence, inutile ou
impuissant. Quelque texte essentiel se construit
dans la tête sans plus aucun désir de le voir sur le
papier, sans plus aucune force de le donner, ne
serait-ce qu'à soi-même.