Rien ne prédisposait le jeune et mondain comte Galeazzo
Ciano (1903-1944) à tenir un rôle de premier plan dans les affaires
de l'État italien, si ce n'est peut-être sa prestance avantageuse et
sa conversation brillante. Mais, en 1930, le diplomate en poste
à Shanghai épouse Edda, la fille aînée de Benito Mussolini.
Désormais, le destin des deux hommes sera indissolublement
lié. De responsable de la propagande fasciste, le «héros» de la
campagne d'Éthiopie devient en 1936, contre l'avis de la vieille garde
qui n'apprécie guère son dilettantisme et ses liens avec l'aristocratie
romaine, le nouveau ministre des Affaires étrangères et le numéro
deux du régime.
Sous son ministère, Ciano tint un journal quasi quotidien
des événements, où il relate avec cynisme et sincérité la montée
inéluctable de la guerre et la politique hasardeuse suivie par l'Italie.
D'abord favorable à un rapprochement avec Hitler, on le voit
s'opposer peu à peu, au lendemain de la signature du pacte d'Acier
(mai 1939), à la politique pro-germanique agressive de son beau-père.
Partisan de la conclusion d'une paix séparée avec les Alliés,
puis de la démission du Duce, il est finalement exécuté comme
traître en janvier 1944, un an après sa destitution qui conclut le
Journal. C'est grâce à son épouse, qui les emporta avec elle, cachés
sous sa jupe, dans sa fuite vers la Suisse, que les précieux carnets y
furent publiés au lendemain de la guerre.
Ce témoignage historique capital sur la Seconde Guerre
mondiale, source de première main pour les historiens du fascisme,
n'avait jamais été réimprimé en français depuis 1946. Il devient enfin
accessible au grand public dans cette nouvelle édition, préfacée,
annotée et entièrement révisée par Pierre Milza, professeur émérite
à Sciences Po Paris et éminent spécialiste de l'histoire du fascisme
(Conversations Hitler-Mussolini, 2013 ; Histoire de l'Italie des origines
à nos jours, 2005 ; Mussolini, 1999).