Il n’y a pas de « crise de 2008 ». C’est plutôt un changement d’époque que saisit Laurent Grisel, et dont il date le début « à la fin de l’hiver 2005-2006. »
Ce fut, de toute façon, bien plus qu’une crise économique. Nous y sommes encore, et nous en connaissons toutes les dimensions psychologiques, écologiques, géopolitiques – métaphysiques, même, puisque les catégories de pensées qui tourbillonnent dans l’air du temps pour saisir le monde sont fausses, elles font défaut, il faut les reprendre – et tout ce journal est un effort en ce sens – une bataille livrée contre les généralités et les bavardages, contre les charités aveuglées et aveuglantes, dont on ne peut sortir que par un surcroît de précision, par la recherche des relations de cause à effet, non en fantasmagories, surtout pas en lieux communs, mais matériellement, par la tenue ensemble de toutes les dimensions de l’effondrement en cours.
L’année 2008 fut celle d’un quinquennat Sarkozy commençant par des politiques d’extrême droite, de « l’affaire Kerviel ‒ Société Générale », des faillites de Countrywide, de Lehman Brothers, d’AIG. Dans ce troisième volume du Journal de la crise comme dans les précédents, Laurent Grisel, en écrivain qui finit d’écrire Un Hymne à la paix (16 fois), déplace le regard. « 2008 fut pour moi l’année de la faim », écrit-il : celle des émeutes de la faim dans près de 40 pays, comme un avenir qui nous est promis. Son enquête en découvre les causes, exposées au vu de tous et pourtant brouillées et niées ‒ et il en fait un événement qui rassemble tous les traits de l’époque, écologiques, industriels, financiers, politiques, humains ‒ nouant ainsi tout ce qui a été appris depuis 2006 et nous entraînant vers les deux volumes à venir, Avant et Après.