Source inestimable de renseignements pour le spécialiste,
cri bouleversant pour le simple lecteur, le Journal intime
de Sophie Tolstoï, qui a consacré sa vie à Léon Tolstoï et lui
a donné treize enfants, nous force à constater que le génial
créateur d'Anna Karénine n'a jamais rien compris à la femme
qui a vécu dans son ombre quarante-huit années durant.
Sophie Tolstoï entame la rédaction de son journal dès son
mariage et la poursuivra jusqu'à la mort de l'écrivain. Elle y
tient la chronique d'une vie conjugale éprouvante où les maternités
à répétition, l'éducation des enfants et la gestion du
domaine d'Iasnaïa Poliana et de la maison de Moscou viennent
s'ajouter à son activité de secrétaire, dactylographe,
copiste et correctrice de Léon. Jusqu'à cette nuit de l'automne
1910 où Tolstoï s'enfuit pour mourir, quelques jours
plus tard, dans une gare de campagne. Sophie ne pourra
même pas lui dire adieu : leurs enfants lui interdisent l'entrée
de la pièce où il agonise. Elle s'éteindra en 1919, en
pleine guerre civile, dans son domaine nationalisé.
Aujourd'hui rassemblés en un volume, les deux tomes de
cette passionnante confession projettent une lumière crue
sur la vie intime du célèbre écrivain et les rapports complexes
qui l'unissaient à sa femme.