Ce recueil de textes, déclarations de congrès et articles de presse, illustre l'histoire d'un courant important du mouvement libertaire. Julien Le Pen (1878-1945) y occupe une certaine centralité par la longévité de son action et sa ténacité. Il appartient à une génération ayant commencé à militer autour de la Première Guerre mondiale, cette fameuse génération du feu, même s'il n'a pas connu l'expérience directe de la guerre. Opposant à la guerre, participant de la scission syndicale de la Confédération générale du travail, en 1921, et fondateur de la CGT-Unitaire l'année suivante, il incarne ensuite un parcours minoritaire dans le mouvement libertaire. Il choisit, après la période des scissions, un itinéraire conflictuel et marginal, tant dans le mouvement libertaire que dans le mouvement syndical, incarnant l'espoir jamais réalisé de rendre à la CGT son lustre passé des heures de gloire du syndicalisme d'action directe. Il n'est pas le seul ; d'autres figures de l'anarchisme ont pris, au moins temporairement, un chemin similaire et des itinéraires proches. Enfin, par ses interventions, Le Pen est le plus représentatif de ces syndicalistes porteurs d'un message au carrefour de deux cultures sociales politiques contradictoires : réformistes chez les révolutionnaires, et révolutionnaires chez les réformistes, représentatif de la diversité des cultures syndicales et des cultures libertaires.
Si le présent volume évoque, à travers ces textes, l'histoire mouvementée de ce courant entre 1919 et 1940, il nous permet aussi de poursuivre le débat au sein des syndicats de combat aujourd'hui.