"J'avais ouvert le cockpit, l'air marin montait jusqu'à
mes narines, je fermai les yeux. Je voyais les autres,
mes compagnons, ceux qui étaient morts avant
moi, ceux qui avaient quitté leurs hautes écoles,
leurs universités pour ceindre leur front du bandeau
du kamikaze. J'entendais leurs voix, leurs rires, et
maintenant ce silence. Je les revoyais sur une
photographie prise avant leur départ. Casques
d'aviateur, lunettes ramenées sur le front, aucun
d'eux ne souriait. Ils allaient mourir. Ils le savaient.
Certains semblaient farouchement déterminés,
d'autres, songeurs, portaient encore sur leur visage
la marque de l'enfance. Leurs fantômes me rejoignaient
et me demandaient des comptes. Il fallait
que je meure."