« Entre la sortie et la porte, après les quatre voies qui s'enfoncent et avant les douze voies qui filent au nord et au sud il y a ces deux voies qui montent vers la dalle et le palais, et sous ces deux voies soutenues par cinq piliers il y a cette absence de renforcement où j'dors, entre le deuxième et le troisième pilier.
Là, au milieu des bagnoles, entre plusieurs parois de béton, y'a une chose de moi. Même usée par les gaz et le bruit y'a une chose de moi qui persiste, qui dure, molle, sans forme, une chose qui s'maintient, qu'arrive à s'adapter, à supporter. »
Dans les rues de Paris et de sa proche banlieue, Ludovic Michaux a photographié les dispositifs mis en place pour empêcher les sans-abri de s'installer sur les trottoirs ou sous les porches des immeubles. Au cours de ses recherches, il découvre le long du périphérique un sans domicile fixe qui réalise de surprenantes installations à partir d'objets ramassés dans les poubelles.
Arno Bertina a puisé dans ces photographies la matière chaotique et poétique d'une fiction à deux voix, celle d'un agent de surveillance du périphérique et celle d'un SDF. Leurs deux écritures soulignent en parallèle la violence d'une réalité sociale glaçante, bien que peu perceptible.