De quel sublime sommes-nous capables ? Voici peut-être une des questions
que Cinna et Polyeucte nous adressent. Plus obscures à nos temps
modernes que la légitimation du crime et l'aspiration à la perdition, la
clémence et la grâce offrent un mystère auquel Corneille donne toute sa
force d'inouï. Non pas modernes mais contemporaines, intempestives, ces
deux tragédies nous invitent avec éclat, mais aussi avec une douceur inattendue,
à explorer cette «obscure clarté» qui peut propulser chacun à une
altitude insoupçonnée, sans le séparer néanmoins de la commune humanité.
Douceur et clarté des fins heureuses où les liens humains se trouvent
refondés dans Cinna, transcendés dans Polyeucte. Douceur et clarté d'une
dramaturgie qui, tout en transportant le spectateur par l'extraordinaire
d'une action vraie, lui offre tous les moyens d'apprécier l'art avec lequel
elle est représentée, et de s'en divertir.