L’histoire a longtemps été la parente pauvre de la comptabilité, spécialement en France. Si on pose à des musiciens, même amateurs, la question : « Qui était Mozart ? », on aura toujours une réponse. Si on pose à des professionnels de la comptabilité – ne parlons pas des amateurs – la question « Qui était Pacioli ? », il y a de fortes chances qu’un lourd silence s’installe. Les comptables de tous bords n’ont pas encore compris que l’histoire de la comptabilité est indispensable à sa pratique.
Les lecteurs, même cultivés, ne savent pas que la comptabilité a précédé l’écriture, qui a elle même permis le développement de l’histoire. Élément de mémoire, élément de négociation, base d’action, la comptabilité tient une place importante, prépondérante même dans la gestion moderne des entreprises et des organisations. Cette place importante lui a toujours été reconnue, depuis les temps les plus reculés. Si l’histoire a longtemps été la parente pauvre de la comptabilité, inversement la comptabilité a longtemps été la parente pauvre de l’histoire. L’histoire financière et monétaire, l’histoire de la fiscalité, ont été laissées à l’abandon, parce qu’il s’agissait de domaine où il était difficile de faire de l’histoire engagée. Les écoles historiques françaises ont laissé de côté, pour la même raison, l’histoire de la comptabilité, qui est à la fois moins engagée que d’autres champs de recherche et d’un premier accès difficile. Existant depuis six millénaires, aussi vieille que l’astronomie ou la religion, la comptabilité vaut la peine qu’on se penche sur son histoire. Cette histoire est multiforme et le brouillon de l’historien, comme celui du comptable, aurait tout d’un palimpseste si l’on n’y prenait garde.
Ce livre, le premier de son genre écrit en français, cherche à combler quelques lacunes et à réconcilier les comptables avec l’histoire.