Mémoires de Mademoiselle de Montpensier
Tome III (1653-1656)
« A mon arrivée, je ne songeai qu'à taire accommoder un théâtre en diligence ; il y a à Saint-Fargeau une grande salle qui est un lieu fort propre pour cela : j'écoutais la comédie avec plus de plaisir que je n'avais jamais fait. Le théâtre était bien éclairé et bien décoré : la compagnie à la vérité n'était pas grande ; il y avait des dames assez bien faites. Nous avions, les dames et moi, des bonnets fourrés avec des plumes ; j'avais pris cette invention sur un que madame de Sully portait à la chasse : l'on avait augmenté ou diminué, de sorte que cela était fort joli. Madame de Bellegarde, qui ne demeure qu'à dix ou douze lieues de Saint-Fargeau, y venait souvent. Après le plaisir de la comédie, que le carême fit finir, le jeu du volant succéda : comme j'aime les jeux d'exercice, j'y jouais deux heures le matin et autant l'après-dînée. Mon mail s'acheva : j'y jouai avec madame de Frontenac, qui me disputait sans cesse, quoiqu'elle me gagnât toujours ; j'avais plus d'adresse, mais la force l'emportait. »