On a l'habitude de penser que la démocratie
moderne vient des Lumières, de l'usine, du commerce, de
la ville. Opposé au citadin et même au citoyen, le paysan serait
au mieux primitif et proche de la nature, au pire arriéré et réactionnaire.
À l'opposé de cette vision, ce livre examine ce qui, dans les
relations entre les cultivateurs et la terre cultivée, favorise l'essor
des valeurs démocratiques et la formation de la citoyenneté. Défile
alors sous nos yeux un cortège étonnant d'expériences agricoles,
les unes antiques, les autres actuelles ; du jardin d'Éden qu'Adam
doit «cultiver» et aussi «garder» à la «petite république» que
fut la ferme pour Jefferson ; des chambrées et foyers médiévaux
au lopin de terre russe ; du jardin ouvrier au jardin thérapeutique ;
des «guérillas vertes» aux jardins partagés australiens.
Cultiver la terre n'est pas un travail comme un autre. Ce n'est
pas suer, souffrir ni arracher, arraisonner. C'est dialoguer, être
attentif, prendre une initiative et écouter la réponse, anticiper,
sachant qu'on ne peut calculer à coup sûr, et aussi participer,
apprendre des autres, coopérer, partager. L'agriculture peut
donc, sous certaines conditions, représenter une puissance de
changement considérable et un véritable espoir pour l'écologie
démocratique.