Au moment où s'esquisse un « grand retour de Marx », il est particulièrement opportun de connaître la provenance de sa méthode et d'en comprendre l'originalité. La crise du capitalisme, ouverte à l'automne 2009, conduit à s'interroger sur les contradictions du régime économique.
Le problème est-il uniquement financier ? À supposer qu'il soit possible de brider la spéculation, cela serait-il suffisant pour « normaliser » son fonctionnement ? Il est permis d'en douter, mais passer de la morale à l'analyse requiert une rupture avec les bons sentiments, les évidences des représentations courantes et les approximations des déductions ordinaires.
Comment raisonner correctement ? Comment penser le mouvement ? Intimement liées, les deux questions n'en sont pas moins distinctes et ont donné lieu à deux branches de la philosophie : la logique formelle et la logique dialectique. René Mouriaux traite des deux versants du savoir attaché à ce raisonnement. Le terme dialectique a plusieurs significations puisqu'il désigne au moins, selon les époques ou les auteurs, trois réalités différentes : un raisonnement sur le vraisemblable, la logique formelle elle-même et la pensée en mouvement, notamment chez Platon, Hegel et Marx.
Au cours de trois grandes périodes (l'Antiquité, le monde chrétien, l'époque moderne), l'auteur étudie l'élucidation de l'acte de raisonner (concept, jugement, syllogisme) et les tentatives de formaliser le processus de la pensée en mouvement.
Deux chapitres sont consacrés à Karl Marx et à son oeuvre. Appuyé sur les dernières traductions et les commentaires, des plus anciens aux plus récents, l'analyse du discours marxien vise à montrer que ce dernier ne saurait être isolé des conjonctures historiques qui le conditionnent et qu'il tente d'infléchir. La dialectique est dans les choses et la connaissance des sociétés, de l'économie, de la politique et de l'idéologie, réclame une pensée propre à expliciter les processus, les continuités et les ruptures.