LA DOCTRINE
L'étude n'avait jamais été réalisée : celle du droit savant et des docteurs, depuis Rome jusqu'à nos jours. Un véritable roman où l'on voit que la référence aujourd'hui usuelle à la doctrine n'apparaît en France que vers 1850. D'abord intuitive, cette notion est construite un peu plus tard par l'École scientifique qui, pour résister à la montée des sciences sociales, fonde la doctrine sur le primat de la dogmatique. A partir des années 1920, la doctrine s'identifie ainsi à une certaine manière française (une école française ? ) distincte de celle adoptée par les autres pays doctrinaux, qui sont en substance les pays romanisés.
Limitée au rôle de simple autorité - par une théorie des sources du droit qu'elle-même a façonnée -, la doctrine française n'est pourtant pas dépourvue de pouvoir. Elle constitue une importante communauté d'auteurs dominée, sauf en droit administratif, par la figure de l'universitaire souvent critique, mais dont la vocation est toujours d'ordonner le droit positif.
Pareille mission, qui légitime l'ordre juridique et la doctrine ellemême, n'est toutefois pas une caractéristique intemporelle ni universelle du droit savant. Un détour par les Etats-Unis montre qu'il peut exister, même de nos jours, une conception pluraliste de la science du droit...