D'origine chilienne, Jorge Barudy a quitté son pays en 1973 après une expérience personnelle de la prison et des violences de cette époque. A Bruxelles où il exerce, il a créé et dirige un centre médico-psychosocial pour les exilés ayant subi les mêmes sévices. En plus de vingt ans, il a développé une compétence reconnue dans son approche familiale et sociale de la maltraitance de l'enfant : négligence parentale, violences physiques, abus sexuels. Il situe ces faits dans le contexte écologique du temps présent marqué par une dégradation des liens communautaires, la diffusion des actes violents, la commercialisation des faits sexuels. Il décrit la transmission de ces agressions d'une génération à l'outre ainsi que la fréquence de la disqualification des plaintes de l'enfant en situation de maltraitance, le secret étant couvert par ceux-là mêmes qui devraient y mettre fin.
Impliquant les familles maltraitantes, Jorge Barudy analyse avec chacune d'elles les interactions inductrices. En effet, même quand les abus provoquent des interventions médico-sociales et judiciaires, il est nécessaire que l'abuseur et les complicités qui favorisent ces actes violents fassent également l'objet d'un travail psychologique approprié. La dimension familiale des troubles exige ces approches complexes auprès des participants vivant sous le même toit et des personnes privées et publiques directement impliquées.
Dans ce domaine si difficile, le pragmatisme et le sens collectif propres aux théories et aux interventions systémiques centrées sur l'enfant dans chaque situation de maltraitance facilitent le travail clinique. Tant au niveau d'une équipe que du réseau, une approche globale doit être conduite alliant les aspects individuel, familial, médico-social et judiciaire. Cette douleur de l'enfant - que ceux qui l'infligent voudraient souvent ne pas voir - est montrée ici dans toute sa complexité avec l'humanisme et le savoir du clinicien.