La faction de la Sierra
Portant sur le Venezuela rural du milieu du XIXe siècle, cet ouvrage a pour objet une faction armée qui se déploie dans plusieurs provinces du pays en 1858 et 1859, en réaction à la destitution du président en place, José Tadeo Monagas, classé dans le camp des libéraux. Cette faction est menée par trois hommes qui prennent les armes en mars 1858 pour dénoncer cette destitution. Si l'on s en tient à l'historiographie, à la fois parcellaire et partiale, on ne dispose que d'une version officielle assez lisse des faits : trois chefs présentés comme des bandits et qui se seraient mobilisés pendant près de 18 mois, seuls contre tous, pour soutenir un président déchu ; trois hommes qui seraient panthéonisés en 1897 comme héros de la cause fédérale et libérale et feraient plus récemment l'objet d'une instrumentalisation politique sous la présidence de Hugo Chavez. Véronique Hébrard s'est emparée de ce moment précis comme d'un événement à part entière pour appréhender dans un premier temps les dynamiques de mobilisation et d'engagement des populations rurales de la zone concernée, prises en étau entre la répression des autorités et la contrainte, et proposer dans un second temps une réflexion sur les logiques partisanes et les pratiques politiques factionnelles telles qu'elles se déploient dans les décennies postérieures aux indépendances, ainsi que sur les violences et le fonctionnement de la justice dans un Etat aux institutions encore embryonnaires. Cet ouvrage vise ainsi à mettre en lumière la façon dont une faction armée, déconnectée du parti dont elle se réclame, n'en contribue pas moins à une politisation du social et des acteurs qui en sont des membres plus ou moins consentants, et à une socialisation du politique.