Considérer que l'État moderne a d'abord une configuration
théologico-politique peut apparaître anachronique, tant ce
concept est désormais très lié à sa formation démocratique
et libérale. Mais la souveraineté du peuple n'aura pu faire
l'impasse dans l'histoire européenne avec la souveraineté du
roi par délégation divine au spirituel et au temporel, théorie
que ne saurait accepter le Siège romain. La controverse
qui éclate entre Jacques Ier et le cardinal Bellarmin après
l'attentat manqué contre le roi en 1605 témoigne magistralement
de ce double contentieux, politique et ecclésiologique,
pour savoir qui détient la souveraineté absolue de
droit divin : le roi ou le pape ? Sa résonance en France est
capitale, l'assassinat d'Henri IV et les États généraux de
1614 en sont la meilleure illustration. En d'autres termes, la
maîtrise politique d'une société sur elle-même implique un
État souverain écartant toute ingérence étrangère, y compris
au nom du salut des âmes. Thomas Hobbes accréditera
philosophiquement cette thèse.