Pourquoi considère-t-on la Grande-Bretagne comme le mauvais élève de la classe européenne, toujours réticent, toujours critique, qui, depuis les années 1950 jusqu'à aujourd'hui, a refusé de s'engager dans les projets d'intégration de l'Union européenne ? L'arrivée de Tony Blair au pouvoir va-t-elle changer cet état de fait ? Pour répondre à ces questions, il faut revenir aux sources d'un double malentendu entre Britanniques et continentaux : ceux-ci refusent souvent de voir la logique à l'oeuvre dans l'attitude britannique (même si celle-ci ne se laisse pas toujours clairement distinguer) et négligent un certain nombre de facteurs spécifiques à ce pays. Les Britanniques, de leur côté, ont sous-estimé et mal compris la portée du processus d'intégration européenne entamé dans les années 1950.
Pour comprendre comment on a abouti à ces malentendus réciproques, il est indispensable de mettre l'accent sur des facteurs proprement britanniques, qui sont à l'origine d'une scène politique interne particulière : le poids de l'histoire et peut-être de la géographie ne doit pas être négligé. Il faut revenir aussi sur les mythes fondateurs qui ont forgé la nation anglaise et le nationalisme britannique, qui se sont définis en opposition par rapport au continent pendant des siècles, abrités derrière un fort sentiment de supériorité.
De cette histoire particulière découle une culture politique peu encline à une participation dénuée d'arrière-pensées à la construction européenne, qui explique la violence des passions et débats que continuent à susciter, outre-Manche, les questions européennes et dont Tony Blair, si populaire soit-il, devra tenir compte.