Michel Foucault n'est pas réputé être un théoricien de l'État, mais un penseur du pouvoir partout où il se trouve (dans
l'école, la prison, la caserne, l'usine, l'hôpital). Et pourtant, il apparaît qu'il s'était lancé dans une grande généalogie
de l'État moderne. Cet ouvrage se propose de dissiper ce paradoxe en démontrant deux choses.
Oui, il existe bel et bien une théorie foucaldienne de l'État : elle n'est ni systématique ni achevée, mais on peut
la reconstituer tant à partir de la fabuleuse richesse des textes de Foucault qu'en le faisant dialoguer avec de grandes entreprises voisines, venues de la philosophie et des sciences sociales : le marxisme, Weber, Elias et Bourdieu, entre autres.
Oui, la généalogie est compatible avec la sociologie. Les concepts de biopolitique,
discipline, pastorale, gouvernementalité ne sont pas autre chose que des outils
pour saisir l'étatisation des rapports de pouvoir, c'est-à-dire les processus de monopolisation politique qui, du Moyen Âge à nos jours, sont au principe de nos prétendus Léviathans en Europe. L'État ? Non pas le plus froid de tous les monstres froids, ni seulement un grand appareil répressif, mais l'effet et l'opérateur de gouvernementalités multiples, de rationalités
hétérogènes, de dispositifs variés.
Ceci n'est pas un nouveau livre sur Foucault. C'est un livre sur l'État et la possibilité toujours vivante d'en faire une
théorie, retrempée dans l'eau acide de la généalogie.