« Réfléchir sur la guerre amérindienne incite aussitôt à la comparer aux phénomènes belliqueux d'autres parties du monde, et notamment de l'Occident. Alors que depuis l'Antiquité nous avons tendance à détruire l'ennemi, celui-ci est appréhendé par les Amérindiens comme un élément constitutif du soi. D'où le traitement symbolique qui lui est réservé tout au long du parcours visant à incorporer ce dont il est le support : une singularité, des substances vitales, un certain regard sur le monde. »
Les articles qui composent ce volume privilégient un aspect peu exploré des pratiques guerrières : les régimes de traitement du corps, celui des meurtriers comme celui des victimes qui leur sont associés. Parmi les manières dont on intervient sur le corps de « l'autre » afin de reproduire sa propre identité, on trouve la pantomime des guerriers Ayoré au retour de leurs expéditions victorieuses, ainsi que la mise à mort de l'âme de l'ennemi déjà tué en le représentant par un dessin tracé sur le sol ; le traitement du captif chez les Tupinamba avant qu'il ne soit dévoré, ainsi que les contraintes rituelles auxquelles est soumis son bourreau ; la danse qui allège le corps des Guarani pour qu'ils puissent atteindre la terre sans mal, et la fête du miel et de l'amour chez les Aché-Guayaki qui confirme la relation lévi-straussienne entre guerre et mariage.