Plus long que la Première et la Seconde Guerre mondiale, que la guerre
d'Algérie ou que celle du Vietnam, l'interminable conflit afghan a broyé les
espoirs de «nation building» que nourrissait l'Occident. Plus de dix ans d'une
guerre «asymétrique» contre un ennemi aussi insaisissable qu'omniprésent
n'ont pas suffi à endiguer les calamités qui ravageaient l'Afghanistan : guérilla,
terrorisme, rivalités ethnico-tribales, économie à la dérive, corruption endémique,
pouvreté. Certains fléaux, comme le trafic de drogue, se sont même
aggravés. L'Occident a payé son obstination au prix fort : plus de 3 000 militaires
de la coalition tués, des dizaines de milliers d'autres blessés, des milliers
de victimes civiles «collatérales» et 2 000 milliards de dollars partis en fumée...
À l'heure où les corps expéditionnaires des membres de la coalition lèvent
le camp les uns après les autres, Hervé Asquin dresse le «post mortem» de
cette guerre si longue et si coûteuse. Un bilan militaire et politique, bien sûr,
mais également humain, car ce sont d'abord les soldats, les sous-officiers et les
officiers américains, anglais ou français, et leurs protégés de l'Armée nationale
afghane, qui ont payé le plus lourd tribut, celui du sang, à ce mirage.
Correspondant de l'AFP de 2006 à 2010, il a interrogé les ministres successifs
de la Défense, les hauts gradés, accompagné de la Kapisa à l'Helmand
les militaires français dans leurs opérations de «contrôle de zone», partagé la
tambouille des engagés afghans. Il révèle aussi les tensions extrêmes qui opposèrent
Chirac et Jospin au lendemain du 11 septembre 2001, lorsqu'il fallut se
montrer solidaire des Américains jusque dans l'erreur.
Ce livre, qui alterne géopolitique et vécu à hauteur d'homme, explore au
plus près du terrain les ressorts de la corruption et les errements stratégiques et
diplomatiques qui ont entraîné le monde dans cette guerre, la plus longue, la
plus chère et l'une des plus vaines qu'ait connu l'Occident depuis des siècles.