Tapie sur la colline, nue dans les herbes drues, entre mes bras mes seins, je l'observe... Il porte des oranges à ses progénitures, il est en érection, ce qui me semble être un prodige... Je l'aime. Comme il m'a enlevée, je voudrais le ravir... Je glisse sur les fesses, je rejoins ma caverne. Je l'attends, je le peins. [...] Dans ce plissé, soustraite au monde, je vaque de la matière au corps, du corps à la matière, sorte de danse lascive récitative omniprésente, les mains, la tête au bout, tout l'être, à la recherche du contact d'un autre corps réel, connu, identifié, dont la venue dans l'œuvre me conduit à un ahurissement synonyme de survie. [...] Mais quelque chose gît, une ombre se confond avec ce trajet blanc de la ligne maîtresse. Celle d'un colosse échu, les pieds cousus aux nôtres, le front brisé au loin dans un angle de fuite. Ogre à la panse d'airain, il dort profondément et dans son ronflement, nous percevons l'écho des guerres et des fléaux. Sous le rocher de sa semelle, son enfant cupidonien vit une trève [...].
Ce récit sur l'amour de l'art autant que sur l'art d'aimer, prend le relais d'une sculpture en quête de ses modèles. Sont-ils réels, sont-ils fantasmés ou sont-ils l'un et l'autre ? La Main d'Hermès, fébrile, fougueuse mais fine et sans fausse pudeur, reconstitue l'esthétique et la plastique d'une vie où l'on scrute (où l'on sculpte !), jusque dans ses plis intimes, l'autre, l'Autre quasi mythologique qu'on appelle pour en jouir. Nathalie-Noëlle Rimlinger invite à partager une tension animale qui sous-tend toute création ; elle contemple, pour nous, lecteurs, ses fantasmes et son expérience vécue d'artiste et de femme, elle nous dit comment établir le contact, comment partager son domaine secret, celui que nous n'exposons d'ordinaire pas au tout-venant... Le lecteur devient spectateur.