«En groupe, en ligue, en
procession», les manifestants
arpentent les rues
françaises. Certes, mais,
ce constat partagé, on
peut y regarder de plus
près. Examinant les
slogans, les banderoles et
les pancartes, détaillant
les types de manifestants
et de manifestations,
analysant leurs rapports
aux partis, syndicats,
gouvernements, État,
recensant les objectifs
et les conséquences
des défilés, Danielle
Tartakowsky, professeur
d'histoire à l'université
Paris VIII, spécialiste des
manifestations en France
au vingtième siècle,
dresse un tableau inattendu
du monde manifestant
des trois dernières
décennies.
Dans cette période, en
effet, si les défilés de
rues ont connu une forte
croissance, prenant
une place majeure dans
l'expression publique,
devenant une pratique
commune à tous les
partis, et faisant à l'occasion
tomber projets, lois
votées et ministres, les
fêtes, marches, forums
interventions, Gay Pride,
street party et autres
«manifestations intergalactiques»,
ponctuelles,
spécifiques ou mondiales,
ont fait éclater le cadre
traditionnel de la manif.
Cette explosion de formes
traduit à l'évidence
un élargissement des
modes de politisation.
Esquisse-t-elle les traits
d'un nouvel espace
public ? Symptôme de
la crise du politique, la
dynamique manifestante
contribuera-t-elle à
ouvrir une issue à
cette crise ?