Pourquoi donne-t-on la mort ? Qu'il soit le fait d'un individu ou
d'un groupe, l'homicide apparaît paradoxalement aux yeux du témoin
«civilisé» comme un acte inimaginable, alors que la pulsion de tuer
est aussi fondamentalement inscrite dans la nature humaine que la
pulsion sexuelle elle-même. Face à ces actes innommables, la société
ne sait que multiplier les termes propres à les rejeter : «barbarie collective»,
«folie individuelle», autant de manières de répéter à l'infini
la question sans se donner les moyens de répondre sur ce qui s'est
effectivement passé et qui peut refaire surface à tout moment, en tous
lieux et à toute époque. D'où la nécessité d'interpréter ce refoulement
entre nous-même et l'acte de donner la mort pour dépasser les
impasses de l'incompréhension, sortir de la fascination morbide et
penser les conditions individuelles et collectives favorables à une
sublimation qui redirigerait le pulsionnel vers d'autres buts.
L'auteur propose dans ce livre trois figures dont le point commun
est de s'avancer au plus près de la pulsion homicide, inaccessible
même pour celui qui commet l'acte et n'en mesure souvent qu'après
coup la nature et la portée : tuer pour défendre son identité, tuer pour
survivre, tuer par ivresse de la toute-puissance.