Comment éclairer la familiarité et la distance que l'homme entretient avec le monde ? Cet étonnement traverse La notion d'a priori, qui propose de « prendre à notre compte » ce concept d'abord associé au formalisme transcendantal.
Poursuivant les réflexions commencées dans La Personnalité de base (1953), Dufrenne montre que cette notion ne saurait se réduire à son acception formelle : elle se découvre aussi dans une certaine expérience du monde. En considérant les acquis des lectures husserlienne et heideggérienne de l'édifice critique, il dégage une dualité de l'a priori, à la fois objet pour l'homme et sujet pour le monde. Mais où donc situer l'origine de ce dédoublement ? Cette interrogation donne lieu au déploiement d'une réflexion profonde et vivante, qui n'en revient pas au formalisme ou à l'ontologie, mais qui se conclut plutôt par un appel à la poésie, lieu du dévoilement du sentiment de l'originaire.
Dans cet ouvrage que Paul Ricoeur qualifiait de « livre à l'écorce dure et à l'amande tendre », Dufrenne témoigne des difficultés auxquelles nous conduit une réflexion sur la notion d'a priori, et par là même de sa fécondité heuristique.