Le politique par le bas en Afrique noire
Dès le tout début des années 1980, les auteurs posaient le problème du politique par le bas en Afrique. Ils soulignaient le rôle des « petits », des « sans importance », des « en bas du bas » dans l'invention de formes originales de l'État, alors même que prévalaient au sud du Sahara des situations autoritaires. Mais ils s'interdisaient aussi de postuler l'existence d'une « culture populaire », en reprenant à leur compte les critiques formulées à rencontre de cette notion. Ils proposaient pour leur part une problématique de l'énonciation du politique, seule à même de restituer l'historicité du politique dans sa complexité et son ambivalence. Leurs analyses ont marqué le renouvellement des études africaines et ont reçu une large audience bien au-delà de ces dernières. Réunies en 1992 dans un volume qui fit date mais qui était épuisé depuis plusieurs années, elles sont aujourd'hui reprises, alors que de nombreux travaux redécouvrent la portée de l'approche du « politique par le bas » et la mettent en perspective avec les subaltern studies indiennes, l'Alltagsgeschichte allemande, la microstoria italienne ou l'historiographie marxiste anglaise. Dans cette nouvelle édition augmentée, une préface inédite montre en quoi elle demeure utile pour comprendre le monde contemporain en dehors des facilités de pensée. À condition de voir qu'elle n'a jamais prétendu être une « école », mais un simple état d'esprit, une forme d'hétérodoxie par rapport aux courants établis des sciences sociales, une expression de cynisme heuristique vis-à-vis des croyances et des convenances académiques ou politiques.