Le présent volume conjoint deux grands soucis, en droit distincts.
Le premier est méthodologique. Il vise à élaborer ce qui n'existe
ni en France ni ailleurs, à savoir une histoire comparée
des philosophies. Par là, il faut entendre une histoire qui brouille
les partages universitaires et reconstruit ses objets propres par
les voies expérimentales auxquelles les vrais historiens
(des institutions, des religions, etc.) sont accoutumés depuis
longtemps. C'est alors l'activité philosophique elle-même qui
apparaît autrement, dans la singularité de pratiques nationales
qui l'effectuent toujours dans une conjoncture donnée. L'Europe
spirituelle n'existe pas.
La seconde préoccupation ordonnant ces analyses est
anthropologique. Elle se présente comme une histoire polémique
des historicités observables de Vico à aujourd'hui, où l'Événement
est devenu la pierre philosophale. On y comprend mieux
comment les hommes, pour simplement vivre, doivent s'installer
dans un temps donné. Ils y nouent présent, passé et futur selon
des modalités indéfiniment variables, mais toujours illusoires :
ainsi se définit chaque époque. L'Histoire universelle n'existe pas.
Dans ces pages, il n'existe donc que des philosophies comme
il n'existe que des historicités. On n'y proclame pas la mort
de Dieu : soyons plutôt polythéistes !