La rétroactivité et le droit fiscal
La rétroactivité peut être définie comme la technique juridique qui permet le retraitement au présent des données du passé. Prétendant agir sur le passé, elle apparaît de prime abord comme une fiction, car le retour en arrière du temps n'existe pas dans la Nature. Pourtant, elle revêt bien une part de naturel lorsqu'elle tire les conséquences juridiques d'événements qui viennent éclairer le passé. Ainsi, la rétroactivité peut être perçue comme une traduction dans le domaine juridique de la relativité du temps. Pris entre un passé accompli et un futur envisagé, l'homme trouve dans cet outil le moyen de maîtriser intellectuellement le temps. Aussi, le système juridique est un système idéal dans lequel il devient créateur. Certes, la rétroactivité est, par essence, potentiellement dangereuse et de fait elle est parfois maniée avec une grande légèreté, notamment par le législateur. Toutefois, elle se révèle être une technique souple dont l'utilité est indéniable dès lors que son emploi est encadré.
Le droit fiscal est amené à appréhender la technique de la rétroactivité dans ses multiples fonctionnalités en Droit. Aussi bien constitue-t-il un terrain privilégié d'observation de celle-ci. Que l'on s'attache à considérer les normes juridiques ou les situations juridiques individuelles, les solutions qu'il pose apparaissent comme étant plutôt révélatrices du rôle joué par la rétroactivité au sein de l'ordre juridique, de sorte qu'il s'agit en définitive d'une technique unitaire qui se nourrit aussi bien du droit privé que du droit fiscal. L'analyse montre en effet que le traitement de la rétroactivité en ce domaine n'est pas aussi particulariste que l'on pourrait croire. Pour l'essentiel, le droit fiscal reçoit la technique de la rétroactivité du droit privé, dans les différents domaines - notamment celui de la loi, de l'acte juridique -, où elle est amenée à intervenir. Parallèlement, il en limite l'emploi et en modère les effets par un encadrement, dans un souci de sécurité juridique et pour des raisons qui lui sont propres, ces dernières tenant à la réalisation de ses objectifs, comme la lutte contre la fraude fiscale, ou aux contraintes de certaines de ses techniques, comme le principe de l'annualité de l'impôt.